Si cet épisode t’a été envoyé et te plaît, pense à t’abonner et à jeter un coup d’œil aux articles précédents !
C’est l’histoire de trois gamins qui ont eu une enfance difficile :
Le premier, “J”, a été abandonné par son père à la naissance et élevé par sa mère de 16 ans
Le second, “R”, est un gamin dyslexique avec des notes catastrophiques qui voulait devenir journaliste
Le troisième, “E”, se faisait tellement martyriser à l’école qu’il porte toujours des séquelles de s’être fait pousser dans un escalier
Quelques décennies plus tard et maintenant adultes, Jeff Bezos, Richard Branson et Elon Musk se chamaillent pour conquérir les étoiles.
Et il y a de l’eau dans le gaz.
Le 12 Juillet, Richard Branson embarquait dans le premier vol touristique et selon lui aérospatial de l’histoire, menant le cours de sa société Virgin Galactic à flamber après son annonce fin juin. Il devançait ainsi Jeff Bezos de 9 jours.
“Ce n’est pas une course”, déclarait-il en conférence de presse “et je souhaite à Jeff bonne chance”, concluait-il, clin d’œil à son concurrent qui a fait un florilège de communications caustiques sur l’événement, sous-entendant notamment que Branson ne serait pas vraiment allé dans l’espace.
Mais alors, y est-il vraiment allé ? Et pourquoi y a t’il tant d’enjeux sur cette étape de notre histoire collective ? Le point 👇
On s’en fout, non ?
Avant de réfléchir à la frontière entre la terre et l’espace, il faut comprendre pourquoi c’est important.
Malgré le penchant terrien pour la mégalomanie, le consensus est que l’espace n’appartient à personne (donc à tout le monde).
On se souvient des moqueries reçues par Trump après avoir annoncé en 2019 la création d’une “Space force”, branche militaire dédiée à la défense spatiale, mais le projet a pourtant une importance capitale.
Les satellites sont devenus l’un des outils géopolitiques majeurs du 21e siècle, car ils représentent le moyen de communication principal des nations. L’absence de règles internationales sur les limites des interactions avec les satellites étrangers inquiète d’ailleurs certains experts.
Dans la liste des technologies qui se développent, on trouve des satellites espions ; ceux destinés à la communication ; des missiles anti-satellites basés sur terre ; des avions pour désactiver les satellites ; sans oublier les satellites nettoyeurs de débris.
Car rappelons-le, l’un des scénarios catastrophes serait la destruction - volontaire ou accidentelle - de quelques satellites, créant une réaction en chaîne baptisée Syndrome de Kessler. Nous serions alors prisonniers de notre propre planète…
Quel est le lien avec la frontière de l’espace ?
Admettons que l’on place un satellite au delà de cette limite. Aucun problème. Maintenant, réduisons son altitude de quelques kilomètres : il survole dorénavant le territoire Chinois, et tu es coupable d’agression militaire. Tu vois le débat ?
Branson est-il allé dans l’espace ?
Où, donc, se trouve la limite de l’espace ? En fait, ça dépend à qui on demande.
Dans les grandes lignes, on considère que c’est l’altitude à laquelle les forces dynamiques orbitales deviennent plus importantes que les forces aérodynamiques.
Quand on flotte, en somme.
Un astrophysicien Hongrois nommé Karmann avait placé le premier cette limite en 1900 autour de 80km, d’après des calculs complexes, dont l’U.S Air Force et la Nasa se satisfont toujours de nos jours.
En revanche, 2 agences concurrentes, la FAI et la NOAA, ont réévalué les maths pour placer la “Ligne de Karman” à 100km. Outre les calculs, ces derniers aiment l’idée que 100 kilomètres, ça fait un chiffre rond.
En réalité, l’espace ne commence pas brutalement. L’atmosphère s’amoindrit de plus en plus jusqu’à disparaître totalement (autour de 600km en moyenne) - les satellites peuvent y orbiter à partir de 80km.
Le VSS Unity qui transportait le fondateur de Virgin et son équipage est donc monté le 12 juillet jusqu’à 90 kilomètres, les laissant en apesanteur pendant plusieurs minutes. À ce titre, il semble remplir beaucoup de critères d’une visite dans l’espace.
Difficile de ne pas voir dans Bezos, qui a été devancé de quelques jours, de l’amertume lorsque sa société Blue Origin a tweeté disant que “leur fusée New Shepard dépassera la ligne Karman pour s’assurer qu’aucun astronaute n’aura une astérisque à côté de son nom”.
Vol spatial = astronaute ?
Après son premier vol réussi à son tour le 21 juillet, Blue Origin ouvre ainsi un nouveau débat sur le terme “astronaute” dont peut de gens peuvent aujourd’hui se réclamer..
Outre l’altitude, la question de se proclamer d’un tel sobriquet dépend aussi, selon certains, de la durée et de la raison pour laquelle on va dans l’espace.
Une personne qui s’embarque en tant que touriste spatial et passe 5 minutes à la limite de l’espace est-elle autant astronaute que Thomas Pesquet, qui a dépassé les 210 jours dans l’espace, effectuant plus de 3000 tours de la terre ?
Jusqu’à présent, le débat se satisfaisait de ne pas devoir trancher, ni pour l’altitude de l’espace, ni pour la dénomination des voyageurs spatiaux. Mais avec l’arrivée du tourisme spatial (et du marketing qui va avec), on suspecte qu'un consensus va devoir émerger.
Un plan pour l’humanité
Si ces débats seront triviaux dans quelques années, l’arrivée du tourisme spatial marque quant à elle une étape majeure dans notre histoire collective.
En fait, nos 3 enfants milliardaires on toujours des rêves plein la tête.
D’abord, rappelons que cette course à l’espace est issue d’un changement de paradigme tôt dans les années 2000 que seuls des entrepreneurs pouvaient imposer, après une réalisation forte : les fusées à usage unique ne pourraient pas être une solution viable pour l’exploration spatiale de masse, faute à leur coûts exorbitants en ressources.
L’enjeu était donc de taille : il fallait créer pour beaucoup moins cher qu’une fusée classique une technologie qui permettrait à une fusée de revenir après avoir décollé - il y a 20 ans, la plupart de l’industrie considérait cela impossible. Aujourd’hui, la fusée Falcon de SpaceX affiche 82 atterrissages au compteur.
Si Branson a opté pour des véhicules hybrides et réutilisables, qui décollent comme des avions mais ont des éléments de structure de la fusée, Bezos et Musk voient plus grand : leurs fusées réutilisables destinées au tourisme spatial ne sont que la première étape d’une vision à long terme.
En plus de son business, de tourisme spatial, Bezos a révélé déployer pour 2024 un alunisseur baptisé Blue Moon, battant SpaceX à l’appel d’offres de la NASA. À terme, Bezos souhaite implanter une présence humaine permanente sur la lune.
Quand à Musk, qui a aussi un rôle majeur dans le déploiement de satellites via le projet Starlink, pour couvrir le globe d’une connexion internet, son objectif dépasse celui de l’orbite terrestre. Il souhaite à terme faire de l’humanité une espèce interplanétaire en installant 1 million des nôtres sur Mars avant 2050, où il assure qu’il n’y aura pas de chômage. Le but ? Avoir un plan de secours si l’humanité devait se confronter à un scénario catastrophe sur terre.
Souhaitons bonne chance à nos 3 rêveurs.