Peut-on ĂȘtre trop heureux ? đ§ââïž
Bien-ĂȘtre vs raison d'ĂȘtre ; les limites du bonheur ; bonheur et parentalitĂ©
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Note : dans cet Ă©pisode, jâai traduit le mot anglais âHappinessâ par âbien-ĂȘtreâ plutĂŽt que âbonheurâ, car il semble plus appropriĂ© au contexte de la recherche en la matiĂšre
Ă premiĂšre vue, le bien-ĂȘtre et la raison dâĂȘtre sont intrinsĂšquement liĂ©s. Il semble logique quâune personne qui a trouvĂ© du sens Ă sa vie soit heureuse et vice versa.
Pourtant, les Ă©tudes tendent Ă dĂ©montrer que mĂȘme sâil y a une corrĂ©lation, ce nâest pas toujours le cas. Ă peu prĂšs 25% des individus nâont pas systĂ©matiquement de lien entre un quotidien satisfaisant et le sentiment dâavoir une vie qui a du sens.
On peut illustrer cette idĂ©e en prenant les figures historiques, hĂ©ros comme tyrans : la plupart ont sacrifiĂ© leur bien-ĂȘtre pour donner du sens Ă leur vie. Ni NapolĂ©on, ni Nelson Mandela, ni Staline nâĂ©taient heureux, dans le sens hĂ©donistique du terme.
La plupart dâentre eux avaient des vies personnelles dĂ©sastreuses, des douleurs chroniques, des addictions, et dâimmenses doses de stress qui rendaient leur quotidien Ă peine supportable.
Pourtant, chacun trouvait la force de se lever le matin grĂące Ă sa raison dâĂȘtre.
Mais ce nâest pas lâapanage des personnages historiques : certaines dĂ©cisions universellement rĂ©pandues dĂ©montrent que nous sommes plutĂŽt orientĂ©s vers la raison dâĂȘtre que le plaisir quotidien.
La plus évidente est celle de faire des enfants.
La parentalité
Les Ă©tudes ont dĂ©montrĂ© que les parents se dĂ©claraient en moyenne moins heureux que les adultes sans enfants pour une pĂ©riode dâau moins 15 ans aprĂšs la naissance, dâautant plus pour les jeunes parents.
Faire des enfants est donc un investissement qui peut porter ses fruits sur le long terme. Mais si lâon se place du point de vue du bien-ĂȘtre, cela reprĂ©sente un risque important pour une rĂ©compense qui nâest pas garantie.
Nous ne recherchons pas seulement le bonheur, mais aussi une raison dâĂȘtre. Nous devenons parents car cela augmente le sens de nos vies davantage que la potentielle rĂ©duction du bien-ĂȘtre. Roy Baumeister
Mais alors, que faut-il maximiser dans nos vies ? Le bien-ĂȘtre ou la raison dâĂȘtre ?
Quelle est la différence ?
Le bien-ĂȘtre est liĂ© plutĂŽt Ă lâidĂ©e de recevoir plutĂŽt que de donner, tandis que la raison dâĂȘtre est corrĂ©lĂ©e plutĂŽt Ă lâidĂ©e de donner plutĂŽt que de recevoir. Des niveaux importants de stress, dâinquiĂ©tude et dâanxiĂ©tĂ© sont liĂ©s Ă davantage de sens mais moins de bien-ĂȘtre. Roy Baumeister
Dans la recherche, le bien-ĂȘtre est dĂ©fini comme lâidĂ©e de se sentir bien, tandis que le sens dĂ©rive de lâidĂ©e de contribuer Ă une cause qui nous tient Ă cĆur, et qui dĂ©passe notre personne.
Intuitivement, on devrait passer davantage dâĂ©nergie Ă rechercher le bien-ĂȘtre, non seulement car câest un objectif Ă©vident, mais aussi parce que ça prĂ©serve notre santĂ©, non ?
Câest loin dâĂȘtre sĂ»r.
Bonheur = santé ?
Il est connu par les chercheurs quâune vie solitaire ou pleine dâadversitĂ© prĂ©pare le corps contre les risques bactĂ©riologiques, car pour nos ancĂȘtres, lâadversitĂ© menait plutĂŽt Ă des blessures physiques.
En revanche, ĂȘtre bien dans sa tĂȘte et avoir beaucoup dâinteractions sociales prĂ©pare le corps contre les infections virales, plus probables en frĂ©quentant dâautres personnes.
Or, les chercheurs Cole et Fredrickson ont montrĂ© que les individus heureux qui trouvent peu de sens Ă leur existence ont les mĂȘmes expressions gĂ©nĂ©tiques que ceux qui rencontrent de lâadversitĂ© - câest Ă dire que leurs corps activent des rĂ©ponses inflammatoires, plus propices Ă mener Ă certaines maladies du cĆur ou cancers.
Il semblerait donc quâune forte raison dâĂȘtre, mĂȘme dĂ©nuĂ©e de bonheur, soit davantage synonyme de robustesse que lâinverse.
Pour revenir Ă notre exemple des figures historiques, celles-ci Ă©taient capables dâencaisser des niveaux de fatigue, de stress et de solitude bien au delĂ de la moyenne.
Mais alors, pourquoi ne sommes-nous pas faits pour ĂȘtre bienheureux ?
Itâs a feature, not a bug
Le bien-ĂȘtre est une rĂ©compense que lâon obtient aprĂšs avoir accompli quelque chose, mais pour Ă©viter lâoisivetĂ© au moindre succĂšs, nos cerveaux sont faits de maniĂšre Ă ce que lâon sâhabitue trĂšs vite Ă une rĂ©ussite - ainsi, la satisfaction liĂ©e finit par dĂ©croĂźtre, nous poussant Ă chercher un nouvel objectif.
Notre bien-ĂȘtre a aussi tendance Ă dĂ©pendre de notre environnement direct, lorsque nous nous comparons Ă notre groupe dâindividus.
Lâavocat New-Yorkais qui gagne un excellent salaire et reprĂ©sente des clients prestigieux ne va pas se comparer Ă lâavocat dâune petite ville, mais Ă ses pairs de mĂȘme niveau.
Son insécurité sera exacerbée, et il va se dépasser encore plus.
Ce mĂ©canisme, tout comme la compĂ©tition, est un avantage pour lâĂ©volution Humaine. La compĂ©titivitĂ© dans la raison dâĂȘtre, câest Ă dire dans le besoin dâĆuvrer Ă ce qui nous dĂ©passe, sert en gĂ©nĂ©ral notre communautĂ© - quand elle nâest pas circonscrite Ă des objectifs matĂ©riels.
Peut-on ĂȘtre trop heureux ?
Si nous sommes effectivement programmĂ©s pour ne pas rester heureux trop longtemps, il en dĂ©coulerait que les personnes les plus accomplies dâun point de vue sociĂ©tal ne seraient pas les plus heureuses.
Une Ă©tude de 2010 a trouvĂ© un plateau de bonheur liĂ© aux revenus, autour de 75.000 dollars par an. Au delĂ , une augmentation de revenus nâĂ©tait pas liĂ©e Ă une augmentation de bonheur.
Les conclusions Ă©taient que le bien-ĂȘtre est dĂ©gressif dĂšs lors que lâon a passĂ© certaines Ă©tapes de la pyramide de Maslow. Ă partir de lĂ , pour avoir une vie accomplie, câest le sentiment de trouver un sens Ă sa vie qui prend le relai.
Effectivement, ceux qui ont le plus de réussite sur des critÚres de société (financiers, professionnels, politiques) ont un bonheur déclaratif inférieur à ceux qui ont des critÚres de réussite basés sur des aspects personnels, comme les relations.
Non seulement lâargent ne fait pas le bonheur, mais la recherche du bonheur est probablement un moteur pour accomplir davantage, produisant⊠de lâargent.
Trop de bien-ĂȘtre nuirait Ă notre capacitĂ© Ă nous dĂ©passer et Ă sortir de notre zone de confort.
Une fois un certain cap de bonheur atteint, arriver aux paliers supérieurs dépendrait donc entiÚrement de notre définition personnelle du succÚs.
If youâre so smart, why arenât you happy ?
Pour lâinvestisseur Naval Ravikant, certaines personnalitĂ©s brillantes considĂšrent que le bonheur leur est dĂ©fendu, car si elles obtiennent ce quâelles dĂ©sirent, elles perdront le moteur de leur rĂ©ussite.
Mais ce nâest pas une fatalitĂ©, affirme Ravikant. Avec cette phrase provocatrice, âSi tu es si intelligent, pourquoi nâes-tu pas heureux ?â, il affirme que si une personne intelligente est plus exposĂ©e aux questions existentielles, elle est aussi mieux Ă©quipĂ©e pour les rĂ©soudre.
Ătre intelligent, selon Ravikant, câest avoir la maturitĂ© de changer de paradigme jusquâĂ mieux supporter notre quotidien.
Câest, en quelque sorte, savoir transformer sa raison dâĂȘtre en bien-ĂȘtre.
Start with why
Le bonheur peut donc se trouver en nous mais dépend de variables qui sont parfois hors de notre contrÎle.
Il est impossible de garantir que nous serons toujours heureux, mais il est possible de nous assurer que notre vie aura toujours du sens.
Le sens, câest accepter de la douleur Ă court-terme en Ă©change dâun sentiment dâaccomplissement Ă long terme. Câest sortir de sa zone de confort en dĂ©pit des sentiments nĂ©gatifs immĂ©diats qui en rĂ©sultent.
Tout le monde sâaccorde sur un point : il nây a aucun raccourci pour ĂȘtre heureux.
Ainsi, nous en revenons au âStart with whyâ de Simon Sinek. Avoir un âpourquoiâ nous donne une ligne directrice et la rĂ©silience de traverser les moments difficiles.
Ensuite, Ă nous de redĂ©finir notre succĂšs jusquâĂ ce que notre bien-ĂȘtre et notre raison dâĂȘtre sâalignent.
Si le âpourquoiâ est suffisamment fort, le âcommentâ devient facile. Jim Rohn
Et toi, pourquoi tu te lĂšves le matin ?