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Jambes croisées sur les couvertures de médias, toujours en jeans et en basket, Tony Hsieh, fondateur de Zappos, était le genre d’individu profondément humble et accessible malgré ses accomplissements. Samedi dernier, nous apprenions sa mort tragique dans un incendie, à 46 ans.
Cette nouvelle m’a marqué, car j’ai lu l’été dernier son ouvrage delivering happiness, à propos de sa philosophie et de la culture d’entreprise qu’il a créée. Étant très exigeant sur les bouquins business, je m’apprêtais à être déçu. Mais j’y ai découvert un homme touchant, profondément préoccupé par la marque qu’il laissera et par la recherche du bonheur - qui dépassait de loin l’aspect “ comment créer un billion dollar business”.
Et au vu des témoignages dans les médias et sur twitter ces derniers jours, il a réussi son coup. Parce qu'’un shot de positivisme fait toujours du bien, j’ai creusé un peu plus sa vision des choses 👇
La bienveillance comme stratégie
Si un client nous demande un produit qui n’est pas en stock, nous visitons le site d’au moins 3 concurrents avec lui afin de l’aider à le trouver quand même.
Dans chaque entreprise, il y a une équipe clé, intimement liée à sa culture. Chez Google, c’est le pôle tech. Chez Apple, c’est le design produit, représenté longtemps par Jony Ive. Dans les fonds d’investissement, le CIO (chief investment officer) est souvent plus important que le CEO.
Une équipe est en revanche rarement représentée comme clé de voûte d’une entreprise à succès : le service client. C’est pourtant le cas chez Zappos, la première plateforme à vendre des chaussures en ligne, que Tony Hsieh a fondé en 1999.
Quand Josh Reich a essayé de débaucher leur Directeur de Service Client, Hsieh l’a découvert et leur a fait une contre proposition : “venez nous rencontrer, nous vous montrerons comment nous opérons et vous apprendrons tout ce que nous savons.”
Josh n’est pas reparti avec le profil qu’il convoitait, mais avec des connaissances nouvellement acquises et une leçon inestimable de bienveillance.
Hsieh considère qu’un client doit être exposé à la pyramide suivante en découvrant la marque: d’abord les produits, qui mènent à une expérience de service client, elle-même reflet d’une culture.
Car pour Tony, Zappos ne livre pas des chaussures, mais un peu de bonheur.
Le bonheur comme objectif
En visitant les bureaux de Zappos, j’espérais passer devant le bureau du CEO. Bureau ? Le mec était dans un box au milieu de ses équipes. @RohanGilkes
Mon dernier article était consacré à Jeff Bezos, qui avait compris dès 1994 qu’internet offrait une opportunité inespérée pour renforcer le lien avec les clients - notamment grâce aux emails et aux commentaires.
Tony, lui, a toujours eu une forte préférence pour l’humain.
Chez Zappos, on ne raccroche jamais le téléphone. En 2010, Tony expliquait que ses équipes pouvaient avoir tous types de discussions avec les prospects : parfois, ils recevaient des appels de personnes se sentant seules, ou demandant conseil sur leur look vestimentaire. Quand, à 3 heures du matin, un ami de Hsieh appelle alcoolisé le service client en leur demandant de l’aide pour se faire livrer une pizza, l’employé de Zappos s’exécute avec énergie en ignorant qui est à l’autre bout du fil. C’est là l’importance de la culture : savoir que n’importe qui dans l’entreprise prendra les mêmes décisions, en toutes circonstances, que le CEO s’il avait été à sa place.
Alors que Jeff Bezos recherche des gens qui bossent dur et qui ont un haut Q.I, Hsieh recherche des profils atypiques, profondément optimistes, qui vont propager la culture même à l’extérieur de l’entreprise.
Chez Zappos, les managers sont invités à passer 10 à 20% de leur temps dans des contextes “non professionnels” avec leurs équipes, pour renforcer les liens. Les sceptiques pourront se raviser : en étudiant les résultats, ils ont trouvé que cela augmentait de 30 à 100% la productivité globale.
La vie est une partie de poker
Le poker commence avant de jouer : choisir la table à laquelle tu vas t’asseoir est la décision la plus importante que tu peux prendre.
Après avoir vendu à Microsoft sa première startup, LinkExchange, Tony a acheté un bâtiment dans lequel il a organisé de nombreuses soirées ouvertes à tous. Puis il s’est mis à travailler dur pour devenir meilleur à un jeu qui le fascinait, un jeu qui allie expertise technique et maîtrise des relations humaines : le poker.
Ceci a profondément changé sa vision du monde, du bonheur, et la manière dont il irait ensuite façonner Zappos.
Tu peux consulter ses principales leçons ici - voici mes préférées :
Aide les gens à construire les histoires qu’ils racontent sur toi
Celui qui gagne le plus d’argent n’est pas celui qui gagne le plus de mains, mais celui qui n’en perd jamais une
Ne joue jamais à un jeu que tu ne comprends pas, même si tu vois d’autres gens s’en mettre plein les poches
Tiens-toi à tes principes.
Ne deviens pas arrogant, ni tape à l’œil. Il y a toujours quelqu’un de meilleur que toi.
Tu dois être passionné par le jeu.
Car c’est la passion de Tony qui l’a poussé à sortir autant des sentiers battus, y compris en prenant des décisions hautement controversées.
Une culture de la disruption
Aujourd’hui, il est impensable d’acheter quoi que ce soit en ligne sans avoir un retour à minima facilité, sinon gratuit. Mais derrière toute innovation, il y a une personne. Et dans ce cas, c’est Tony Hsieh.
Lorsqu’il lance Zappos, en 1999, beaucoup doutent qu’il soit possible de vendre des habits en ligne. Qui serait assez fou pour commander une paire de baskets à 100$ sans l’avoir essayée et sans pouvoir la renvoyer ?
Hsieh ne tarde pas à comprendre que le business ne pourra marcher qu’à une seule condition : les retours doivent être simples et… gratuits. Alors il met l’offre en place, envers et contre tous.
Et il réalise vite que non seulement ce service est immensément bénéfique au bouche à oreille et renforce la fidélisation, mais aussi que les clients renvoient des articles plus rarement que prévu - ils aiment juste avoir la possibilité de le faire.
Avec ça, Hsieh décide de faire de la générosité plus qu’une tactique business, mais un pilier de l’entreprise qu’il revendra 1,2 milliards de dollars dix ans plus tard.
La générosité est-elle une stratégie ?
Dans le livre “Tribal leadership”, Dave Logan et John King expliquent que les entreprises aux performances exceptionnelles se différencient des autres par un seul critère : elles ne cherchent pas à maximiser leurs profits, mais à aller au bout de leur vision grâce à une forte culture d’entreprise.
La passion pour l’objectif amènera le talent, qui amènera inévitablement les résultats pour l’entreprise. Or, quand la culture est axée sur la bienveillance et que la vision finale est de propager du bonheur, des pertes à court terme amènent un gain démultiplié sur le long terme - d’où le succès de Zappos.
De manière générale, la générosité est un élément fondateur de nos civilisations. Rendre service à quelqu’un crée une relation de confiance, et par mimétisme nous avons tendance à nous sentir redevables pour être cohérents, ce qui renforce la coopération.
La chaîne de Fast Food five guys, par exemple, place délibérément des frites en supplément au fond du sac, laissant penser aux clients qu’ils en ont mis en excès dans le cornet et qu’elles ont débordé.
Quand Netflix a commencé à publier les saisons intégrales de leurs séries au premier jour, ils ont été perçus comme plus généreux par leur audience, sans coût supplémentaire. C’est l’un des éléments qui a mené à leur ascension fulgurante.
Pour les clients, ces gestes laissent parfois un souvenir impérissable, d’où peut naître une fidélité à vie envers une marque.
Un souvenir qu’aura laissé derrière lui Tony Hsieh 🙏
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